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Groupe agréable et efficace

Mettre en place des groupes efficaces et agréables, utiliser des processus qui favorisent l’implication et la prise de responsabilité et d’initiative sont sans doute l’une des compétences clé de la vie au 21e siècle. Les compétences pour gérer des groupes efficaces et performants dans le contexte actuel commencent à être de plus en plus clairement identifiées. Voici quelques éléments de base pour mettre en place des groupes efficaces et agréables dans nos initiatives.

Parenthèse sur la hiérarchie et le faire ensemble autrement

Beaucoup d’entre nous ont appris à être dans des groupes et dans des organisations qui fonctionnent de façon hiérarchique. La plupart des entreprises et des associations ont quelqu’un ou un groupe qui dirige et d’autres qui gravitent autour, avec parfois différents niveaux hiérarchiques. Ce mode de fonctionnement a tendance à concentrer le pouvoir dans quelques mains, considérant que les autres n’ont pas la capacité de l’exercer. En réaction à ce type d’organisation, il y a parfois une tendance à vouloir faire l’inverse. Pas de “chef”, pas de hiérarchie entre personnes, des décisions collectives pour tout, une structure “plate”… Passer par là permet d’apprendre beaucoup, et notamment que ce n’est pas forcément plus efficace ou agréable.

Mais les temps changent… et de nouvelles pratiques de faire ensemble, ni pyramidales, ni “plates”, émergent dans de nombreux domaines, allant des entreprises aux associations. On observe que les groupes de transition expérimentent le plus souvent ces méthodes de travail plus collaboratives ou plus agiles, qui font appel à l’intelligence collective, à l’expertise partagée et non à l’expertise d’une minorité.

Notre proposition est de vivre la transition dans des projets qui transforment la localité, mais aussi en apprenant et mettant en pratique des façons de “faire ensemble autrement”, plus résilientes.

Les étapes de la vie d’un groupe

Il existe plusieurs théories sur le fonctionnement des groupes. La théorie exposée ici (adaptée de Bruce Tuckman) présente cinq étapes dans le développement d’un groupe :

  1. La formation
  2. Le débat
  3. La normalisation
  4. La performance
  5. La conclusion

Cette théorie montre notamment comment des conflits surgissent et pourquoi ils sont une étape importante du fonctionnement d’un groupe. Elle peut aider à aborder l’attitude que les membres doivent prendre pour aider à construire une dynamique intéressante. Le modèle est basé sur une progression régulière du groupe d’une étape à l’autre, l’expérience nous enseigne pourtant que les choses se déroulent souvent autrement et qu’il y a des allers et retours entre les étapes.​​​​​​​

1. La formation

À cette première étape, le groupe commence à se réunir, la cohésion dépend beaucoup de l’animateur. Les membres du groupe s’attendront naturellement à ce que les moderateurs les guident et ils auront probablement une foule de questions à poser et d’éléments à découvrir. C’est à cette étape que vous devriez définir ensemble des règles de vie en groupe (cf. cadre de sécurité). Il faudra respecter ces règles et ne pas avoir peur de les faire respecter. Ne vous étonnez pas si certains essaient de les mettre à l’épreuve (consciemment ou non). Ce n’est rien de personnel : ils testent le cadre, tout naturellement.

Utilisez les commentaires spontanés émis par les participants pour aborder certaines questions. Si aucun commentaire n’est fait, parlez en tête-à-tête avec les membres qui semblent moins impliqués afin d’avoir une meilleure idée de leur vécu au sein du groupe. Le groupe devra alors peut-être penser à adapter un peu le style de fonctionnement pour s’assurer qu’ils puissent y trouver une place (sinon ils risquent de quitter le groupe).

Au cours de cette étape, il est important que votre groupe :

  • Prenne le temps d’écouter tout le monde. Affine un objectif commun.
  • Apprenne à connaître chacun de ses membres. Comment gèrent-ils le stress, qu’est-ce qui les fait vibrer, dans quelle mesure partagent-ils leurs pensées et leurs émotions ?
  • Se mette d’accord sur les structures qui permettront au groupe de fonctionner efficacement.
  • Parvienne à trouver des accords, surtout sur la prise de décisions.
  • Reconnaisse qu’au lieu de directement se retrousser les manches, il est tout aussi important, si pas plus, de se poser la question de comment travailler ensemble.

2. Le débat / la confrontation

Le débat désigne l’étape où des conflits commencent à émerger. Pas de panique, cela fait partie du processus normal de la vie d’un groupe. Il est intéressant de se servir du conflit pour discuter de façon constructive et résoudre les différends. Utilisez-le pour faire ressortir les véritables besoins du groupe.

Au fur et à mesure que les membres du groupe apprennent à se connaître, certains peuvent essayer de prendre un rôle de leader.

Il arrive aussi que des petits groupes se forment et que des luttes de pouvoir émergent. Les actes de défiance contre les règles de vie en groupe ne sont probablement pas malveillants (et peut être même pas conscients). Les membres testent les limites et affirment leur individualité. Faites tout ce que vous pouvez pour reconnaître les talents particuliers de chaque participant et donnez-leur l’occasion d’en faire usage. Laissez les émotions s’exprimer et prenez le temps de résoudre les conflits quand ils émergent. Ne vous inquiétez pas si cela vous fait dévier du déroulement initial de la réunion. Ce sont des occasions d’apprentissage inestimables. Même si vous avez des affinités naturelles avec certains individus, un sous-groupe ou une tendance au sein du groupe, efforcez-vous de rester le plus neutre possible et assurez-vous que l’espace reste ouvert à tous.​​​​​​​

Les groupes échouent souvent à ce stade, pourtant primordial pour que votre groupe détermine son propre fonctionnement. Plusieurs éléments peuvent vous aider à surmonter ces obstacles :

  • Une écoute active
  • Un facilitateur neutre
  • Répondre en répétant ce que l’on a compris : « D’après ce que j’entends, tu dis que… »
  • De la patience
  • Un objectif partagé

Des personnes pourraient quitter le groupe et c’est normal. C’est souvent là que le groupe ressent le plus le besoin de se doter de processus et de structures.


3. La normalisation / structuration

À cette étape du processus, les participants commencent à être habitués à travailler ensemble dans le respect des règles de vie en groupe. Les rôles et les responsabilités sont établis et acceptés. Le groupe a trouvé un bon rythme de travail et il a du plaisir à être ensemble, même si les membres ne sont pas toujours d’accord sur tout. L’animateur de l’activité veille à la bonne entente et encourage les membres à prendre leur place au sein du groupe.

Les relations sont beaucoup plus profondes qu’au moment de la formation. À ce stade, tous les membres du groupe deviennent coresponsables des objectifs communs et ont à cœur de les atteindre. Les éléments utiles à cette étape comprennent, entre autres, le fait de : ​​​​​​​

  • Honorer les personnes qui partent : le groupe pourrait ne pas fonctionner pour tout le monde. Si des personnes choisissent de se retirer, trouvez une façon de célébrer ce qu’elles ont apporté au groupe.
  • Voir que le groupe se soude et fonctionne : on a l’impression de participer à quelque chose de passionnant.

4. La performance

À ce stade, le groupe a atteint un bon niveau d’autonomie et peut accomplir beaucoup de choses sans avoir besoin d’animateur. Il est important que les initiateurs ne s’accrochent pas au rôle de leader. Ils sont des éléments précieux de l’équipe et peuvent toujours soutenir les leadership qui émergent subtilement en participant activement, en encourageant ou en suggérant. Des différends se produisent encore à l’occasion, mais ils sont désormais résolus positivement par le groupe. Les changements et les solutions nécessaires sont maintenant imaginés et mis en place par le groupe.

C’est le moment où vous sentez que vous êtes efficaces et que les choses se font naturellement. Quel bonheur ! Votre groupe est compétent et motivé, chaque personne connaît et comprend son rôle et ses tâches. La communication est bonne, tout comme la coopération.

Le groupe sait prendre des décisions et les engagements sont tenus.

Les divergences et désaccords font partie d’une culture de groupe saine. Les résultats font régulièrement l’objet de célébrations et vous prenez le temps de réfléchir à ce que vous voulez atteindre à l’avenir. ​​​​​​​


5. La conclusion (Le deuil)

La conclusion survient quand le groupe “se défait”. Cela peut se produire à plusieurs reprises au sein d’un “groupe ouvert”, lorsque des membres arrivent ou partent. À chaque changement de configuration du groupe, c’est un nouveau groupe qui se forme. C’est pourquoi il est bon de définir un processus, une forme de rituel pour marquer les commencements et les conclusions.​​​​​​​

Pour certains membres, le groupe peut être comme un deuxième foyer. Il est important de reconnaître la vulnérabilité des participants (et du groupe) quand le groupe change, et d’y être particulièrement sensible. Surtout si certains ont tissé des liens solides et se sentent menacés par ces changements. Une conclusion formelle à la fin de chaque activité donne aux membres un sentiment d’accomplissement et leur permet de retenir mentalement les aspects positifs. Il est bon de permettre à chacun(e) de s’exprimer un à la fois sur ce qu’ils ont appris lors de l’activité et sur ce qui, selon eux, a été le moment le plus mémorable. On peut alors se rappeler les interactions, les commentaires et les contributions qui ont eu un effet positif sur le groupe, ce qui permet aux participants de bien assimiler l’expérience…

Il se pourrait que des projets lancés par votre groupe échouent, que des personnes quittent votre groupe, ou même que tout le groupe s’arrête pour une raison ou une autre. Il est essentiel de marquer correctement ces moments. Si une ou plusieurs personnes quittent le groupe, arrêtez-vous : partagez un repas, offrez un cadeau, envoyez une carte.

Si le groupe se dissout, organisez un événement commun pour célébrer tout ce que vous avez réussi à accomplir. Prévoyez un espace de parole pour évoquer les sentiments de perte et de tristesse, ainsi que pour marquer votre reconnaissance vis-à-vis de tous les bons moments passés ensemble.

Vous pourriez vous mettre d’accord sur une façon de transmettre les atouts de votre groupe. 

Réflexions

Dans la vie d’un groupe, il est rare que l’évolution suive exactement le schéma décrit précédemment. Souvent, des étapes se chevauchent. Vous pourriez, par exemple, faire face à beaucoup de confrontations lors de votre phase de normalisation !

Vous devriez également garder à l’esprit que lorsque de nouvelles personnes rejoignent votre groupe, vous passerez par une nouvelle phase de formation pour inclure les points de vue de ceux qui viennent de vous rejoindre, sans toutefois perdre les acquis du précieux travail que vous aurez effectué auparavant.

L’importance du cadre de sécurité

Fonctionner en groupe durablement, travailler en confiance, nous investir pleinement et donc nous engager, demande de la confiance. Et pour faciliter la construction de cette confiance, permettre à chacun de s’épanouir, nous avons besoin d’un minimum de sécurité. Poser notre conscience et des mots sur ce dont chacun a besoin pour se sentir en sécurité permet la co-construction de ce cadre. C’est un outil qui fait appel à la responsabilité de chacun. Il n’y a pas de cadre de sécurité type et applicable à toute situation.

Réf. Réseau transition.be